Avouons-le, toutes les techniques qui nous enseignent nous parents, à être plus zen, plus compréhensifs, sont séduisantes. Mais on se dit aussi que c’est plus facile d’en parler tranquillement que de l’appliquer dans le feu de l’action. A l’heure du bain, des devoirs, du repas, de la fixation de l'heure de rentrée de soirée, qui ne voudrait pas être plus patient, plus pédagogue? Mais voilà, rien n’y fait, on voit rouge, on s’emporte et on s’en veut après coup. La pleine conscience fait partie des outils qui peuvent nous aider à mieux vivre des emplois du temps surchargés d’où déborde un trop-plein d’émotions.
Chaque minute qui passe est importante, car elle ne se représentera jamais. Et pourtant, le plus souvent elles nous échappent les unes après les autres. Il n’y a guère que pendant les vacances que nous prenons le temps, que nous goûtons aux petits plaisirs, au fait d’être ensemble, simplement avec les siens. Le reste de l’année, le stress nous rattrape vite et les enfants, petits ou grands, nous tapent à nouveau sur les nerfs. «Il arrive que les parents se sentent épuisés psychologiquement et émotionnellement. La vie avec les enfants les oblige à multiplier les concessions, à passer bon nombre de leurs besoins et envies au second plan», remarque Charlotte Uvira, formatrice et animatrice d’un atelier de pleine conscience. Qu’elles soient professionnelles, familiales, les obligations ne laissent aucun répit et poussent les parents dans une folle course en avant jusqu’à saturation. «C’est souvent un événement, la maladie, un clash avec un ado qui déclenche la prise de conscience, observe René Stutz, coach holistique . A partir de ce moment va naître la volonté d’avancer vers plus d’harmonie, plus d’équilibre et vers des relations plus saines.»
Quand le parent a le sentiment d’arriver au bout d’un système, il devient urgent de changer de mode de fonctionnement. La pleine conscience est une façon de se recentrer, de se retrouver et de reprendre confiance. «Dans un atelier de pleine conscience, le parent développe une profonde bienveillance pour lui-même, explique Mme Uvira. Nous allons lui transmettre de nouveaux outils pour accueillir les difficultés du quotidien autrement.» Car la pleine conscience ne change pas les choses d’un coup de baguette magique, elle ne les rend pas plus roses, elle permet juste de les accepter sans se sentir coupable de mal faire ou d’être un mauvais parent.
Dans les années 70, le docteur américain Jon Kabat-Zinn a développé la pleine conscience, version occidentale de la méditation bouddhiste. D’abord testée dans les hôpitaux américains pour combattre l’angoisse, le stress, la maladie et la douleur, elle est devenue une technique de bien-être au service de tous.
«Aujourd’hui, les neurosciences montrent que la pleine conscience apporte des bénéfices. Elle met en lumière les schémas qui ont servi jusque-là de protection, de mode de survie», analyse M.Stutz.
Dans la sphère familiale, la pleine conscience amène à se focaliser sur ses sensations, ses perceptions et de rester soi-même dans toutes les situations. «Quand un enfant ne veut pas mettre ses chaussures, au lieu de penser qu’il le fait exprès, on va être capable d’accepter cette tension sans que cela ne nous mine», souligne Mme Uvira. Prendre du recul passe par quelques exercices de rééquilibrage émotionnel. «Le défi du thérapeute est de faire sortir la personne du mental et de l’intellect», estime M.Stutz. Le but est de ressentir, d’éprouver les choses plutôt que les analyser. «Dans le premier atelier, le parent se reconnecte à son propre enfant intérieur, décrit Charlotte Uvira. Il peut alors se rendre compte qu’à l’époque, il se sentait démuni face à la colère des adultes et combien il avait juste besoin d’amour, de gentillesse et de bienveillance.» Quand on remonte dans le passé, le risque est de raviver de vieilles blessures. La pleine conscience est un miroir dans lequel il faut oser se regarder. Mais elle peut nous guérir des traumas, des peurs, des croyances qui nous empêchent d’avancer.
En chassant quelques pensées que nous prenons pour des vérités, la pleine conscience nous rapproche un peu plus de nous-mêmes et de nos enfants. Elle nous ramène au début, à nos premières intentions, au jour de leur naissance quand nous les avons pris dans nos bras pour la première fois et leur avons souhaité tout le bonheur du monde. La pleine conscience nous rend responsables de notre vie et des relations que nous voulons avoir avec ceux qui nous entourent.
François Jeand’Heur
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