Entre pouvoir, négociation et indépendance, l'argent apprend à l'enfant, à l'ado, à gérer ses envies, à faire ses propres choix. Une fois le budget établi, ses parents le laisseront en profiter comme bon lui semble.
A vot' bon cœur
Au début, les occasions de donner quelques pièces sont rares, l'enfant n'exprimant pas de besoins qui ne soient déjà satisfaits. Ses premières années, il les vit d'amour et de lait chaud. Puis, il s’habitue à compter les sous que lui apportent la petite souris, les anniversaires. S'il ne sait pas tout de suite quoi en faire, la tirelire lui servira à recueillir les offrandes familiales. Les tentations ne tarderont pas à se manifester, sous forme de bonbons, de crayons de couleur ou de livres.
Vers 10-12 ans, l'enfant développe son caractère, compare son sort à celui de ses camarades de classe, et devient plus exigeant. Pour les parents qui sont ministres d'à peu près tout à la maison, une politique budgétaire sur la question doit être réfléchie: montant, périodicité, augmentation. A travers l'argent, c'est aussi une philosophie, un apprentissage des valeurs que l'on transmet.
Donner c'est donner
Chaque parent a son propre rapport à l'argent, hérité de son histoire personnelle. Comme il n'existe aucune règle en la matière, il estimera à sa juste valeur le montant de l'argent de poche octroyé à son enfant et les conditions qui s'y rattachent. Salaire ou don, récompense ou rente, il existe autant de façons de donner que de familles. La question des valeurs n'est jamais loin et l'attitude affichée sur la question doit être claire. Les spécialistes de l'enfance délimitent les frontières pour que les objectifs pédagogiques ne soient pas parasités par des conflits d'intérêt. Par exemple, il est important à leurs yeux que les bonnes notes ou que les tâches ménagères ne soient pas rétribuées. Dans un cas, il travaille d'abord pour lui et sa réussite, dans le second, il participe à la vie de la communauté et apprend à partager. Le rémunérer pourrait rendre sa démarche intéressée et déclencher un engrenage infernal. Des travaux de jardinage ou la réussite à un examen, à une compétition peuvent cependant être récompensés car ce sont des événements qui sortent de l'ordinaire. Montrer à l'enfant que des bonnes choses peuvent en provoquer d'autres, c'est l'encourager à continuer à faire des efforts. S'il ne doit pas être la première source d'incitation, l'argent est pour les jeunes un moyen de s'affirmer, de s'intégrer au groupe.
Avoir et être
Les ados sont des consommateurs comme les autres et se déterminent aussi par leur pouvoir d'achat. Suivre la mode, aller au cinéma, au Mc Do, font partie de leur vie sociale. Si pour les parents, les dernières baskets, la dernière console de jeux ou le tout nouveau smartphone leur paraissent des dépenses exorbitantes, qu'ils ne s'offrent pas pour eux-mêmes, ces objets du désir sont pour leurs enfants des facteurs d'intégration. L'argent de poche définit donc leur place, leur rôle, tout comme le salaire, le travail définiront plus tard leur statut social dans la société. Cigale ou fourmi, les parents doivent laisser l'enfant gérer son argent comme il lui plaît, ne pas juger ce qui est utile, ce qui est futile. Même s'ils peuvent le conseiller, ils doivent considérer que préférer dépenser ou épargner, relève de son propre choix. Il n'y a pas de liberté sans risque et en faisant sa propre expérience, il se responsabilise. En revanche, les parents peuvent dire non à l'augmentation et au syndrome du toujours plus. Si leur enfant est trop impatient, ne supporte pas la frustration, ils l'inciteront à gagner par lui-même ce qu'il lui manque. Un job d'été, du baby-sitting finiront de lui apprendre le prix des choses et l'aideront à devenir un peu plus adulte.
François Jeand'Heur
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