Considéré comme le fruit de l’amour, l’enfant n’en provoque pas moins une véritable révolution car les amants doivent maintenant former une famille: d’un duo doit émerger un trio. Nul doute que l’annonce d’une grossesse (surtout planifiée) soit un moment heureux, mais rares sont les couples préparés à cette arrivée.
«Chéri, je suis enceinte!» ... Comment réagir à cet énoncé: en criant et sautant de joie parce que longtemps attendu? En paniquant parce que l’on se sent pris au piège? En paralysant devant l’immensité de la tâche à venir? En restant bouche bée devant cette nouvelle inattendue ? ? ?
D’après une étude californienne (dont j’oublie la référence exacte), un enfant sur quatre est planifié et son arrivée constitue un bonheur intense; un deuxième enfant sur quatre, quoique non planifié, est tout de même reçu à bras ouverts. Reste le troisième un enfant sur quatre qui n’est pas planifié, n’est pas accueilli dans la joie, mais accepté tout de même quoique à contrecœur. Quant au dernier, celui-ci n’est pas planifié, provoque la stupeur et est complètement rejeté… et souvent avorté.
Déjà l’inconfort des malaises du 2e mois et la transformation physique, émotive et psychologique de la femme, pèsent lourdement sur l’intimité conjugale. Sans parler du fait que l’arrivée d’un enfant semble aussi avoir des répercussions biochimiques et psychologiques (encore mal étudiées) sur le corps et le cerveau du nouveau papa. La paternité pousse l’homme à passer définitivement de l’adolescence à la maturité psychologique avec toutes les responsabilités que cela implique.
Plusieurs n’y parviennent pas. Devenir parent n’est pas une mince tâche, surtout que la majorité des femmes et des hommes sont laissés à eux-mêmes devant cette expérience extraordinaire, mais combien bouleversante. Il y a bien sûr des cours prénatal et postnatal, mais la plupart sont axés sur la préparation physique et mentale à l’accouchement et les soins à donner au bébé; très peu se préoccupent de la préparation aux transformations psychologiques et relationnelles des amants qui deviennent parents. Les statistiques démontrent une augmentation significative de séparation et d’infidélité dans l’année suivant l’arrivée d’un enfant.
Sentir la vie germer en soi et la porter pendant neuf mois donne à la femme un sentiment de toute puissance maternelle auquel sera souvent confronté son partenaire. Le jeune homme qui devient père s’investit de nouvelles responsabilités, ce qui stimule son côté protecteur et pourvoyeur. Sa difficulté est de comprendre que sa partenaire a plus besoin de support émotif que de pain. Son rôle vise la transformation de la symbiose dyadique mère – enfant en triade père – mère – enfant: la femme doit accepter que «son» enfant devienne «notre» enfant.
Du jour au lendemain, l’amant doit céder sa place et partager l’amour exclusif de sa partenaire, laquelle découvre un autre sens à sa vie et canalise, en toute légitimité, ses énergies à bien assumer son nouveau rôle de mère. L’homme perd l’exclusivité de son amante pour le reste de sa vie. Un véritable traumatisme masculin très peu étudié par la psychologie moderne.
Les parents se rendent rapidement compte que leur petit «bout d’chou» n’est en réalité qu’un enfant-roi à qui l’on doit obéir au moindre cri. Non seulement le bébé n’est pas arrivé avec un mode d’emploi, mais il n’a ni horaire ni aucune compassion pour les besoins d’autrui ou l’état de fatigue de ses géniteurs. Et non, les deux parents ne s’attendaient pas à toutes ces corvées et ce chambardement dans leur vie jusqu’alors plutôt tranquille et remplie de loisirs et d’activités festives organisées à deux. Passe encore si les soins de l’enfant se terminaient rapidement; mais non, un enfant, c’est un contrat de vingt ans… au minimum.
S’entendre sur des principes éducatifs communs relève presque d’une mission impossible, surtout si l’un est permissif et l’autre, disciplinaire. Pas facile non plus de laisser chaque parent intervenir à sa façon dans sa relation avec l’enfant. La parentalité, c’est deux vases communicants: l’homme sera d’autant père autoritaire que la femme sera maman poule, mais cela donnera lieu à de nombreuses discussions sur la manière d’éduquer l’enfant.
L’enfant a autant besoin d’un père et d’une mère qui posent des limites et éduquent à la responsabilité que d’un papa et d’une maman qui le soignent et s’amusent avec lui. Les parents se doivent toutefois d’être très solidaires, si non l’enfant, et encore plus l’adolescent, «divisera pour régner».
Tout comme la vie à deux prépare à la vie conjugale, c’est en étant parent que l’on devient parent. Et un bon parent, c’est celui qui reconnaît l’importance de l’autre parent, même si ce dernier n’applique pas les mêmes règles d’éducation.
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